Ce colloque sur le thème « Quelle écologie politique pour demain ? » nous invite à interroger « l’utopie qui est nous ». Non pas parce que ce terme, nous semble plus familier qu’un autre, mais parce que comme l’explique Thomas Bouchet et d’autres, il nous « parait proche et lointain[1] » et c’est dans cette ubiquité que nous pensons pouvoir trouver les outils pour penser la perspective du possible[2]. En effet, si pour les grecs topos signifie « lieu », le « u » garde une part de mystère, car il incarne au moins deux significations : soit on l’entend comme un « ou » soit comme un « eu ». L’outopie signalerait, au sens classique du terme, depuis Thomas More du moins, « le lieu-de nulle part » ou le « non-lieu », et dans notre imaginaire collectif ce « ou » permet de rejeter, moquer, dénigrer toutes perspectives que l’on estime irréalisables (par exemple sur le plan social ou économique). Et il y a la seconde signification : l’eutopia. Celle-ci désignerait le « bon-lieu », littéralement « le lieu du bonheur » que l’on pourrait désigner par l’utopie réelle au sens d’Erik Olin Wright[3]. Ce sont ces eutopies qui permettent de s’extraire mentalement en dehors du système globalisé actuel et de comprendre (combattre pour certains) l’univers de l’écologie-monde du dit capitalisme et d’observer ses conséquences directes : le capitalocène[4] ou plus communément l’anthropocène. Depuis les années 1980, telles des vagues idéologiques et surtout pragmatiques, elles viennent de plus en plus éroder, parfois même effriter, le caractère monolithique et linéaire du modèle historique, ontologique, du système capitaliste globalisé[5].
D’autant, que la crise climatique et écologique actuelle annonce un phénomène sociétal des plus paradoxaux : Nous sommes tous rattrapés par les maux générés par nos révolutions techno-industrielles.
Il suffit d’observer simplement à l’œil nu, devant nous, « sous nos fenêtres », dirait Bernard Charbonneau, la pollution de l’air, les déforestations, les feux de forêts, la désertification, l’érosion et la destruction des sols, la plastification et la pollution des océans, de l’eau potable, des terres et des organismes vivants, pour être plus complet ajoutons l’apparition de nouvelles pandémies, le changement climatique, les gaz à effets de serre, les canicules et les vortex polaires, alors que loin de nous, là-bas existe un lopin de la nature que nous imaginons sauvage et lointaine tel un monde parallèle, mais bien arrimée à notre conscience d’humain, l’extinction massive de la biodiversité. Toutes ces plaies que connaît la Terre sont inhérentes à notre économie technicienne. Tous ces phénomènes sont intrinsèquement liés à la dégradation de l’environnement et, de fait, contraignent les systèmes libéraux à penser la crise climatique et écologique qui traverse notre modèle social. Or nous savons que « les sciences et techniques font l'objet de passions sociales et politiques très intenses. L'ampleur extraordinaire des promesses dont elles ont été investies, en particulier la fin de la misère et de la soumission aux aléas de la nature et de la maladie, de même que l'inachèvement manifeste de ces promesses, peut être imprudences, ont nourri une conflictualité sociale dont les différents mouvements qui se revendiquent de l'écologie sont le fruit[6] ». Cette « verdisation » de nos vies est depuis peu matérialisable (car considérée à la fois comme viable, fiable, faisable, et raisonnable) dans nos imaginaires collectifs. Chaque jour, de nouveaux défis socio-politiques poussent nos systèmes démocratiques vers un changement de paradigme économique (économie verte, économie sociale et solidaire, bioéconomie, décroissance, bio-régionalisme, etc.) et vers l’institutionnalisation d’une cité de plus en plus écologique (égalitaire, écocitoyenne, éco-républicaine, etc.).
L’objectif de ce colloque est de réunir dans un cadre pluridisciplinaire différents chercheurs (politistes, philosophes et économistes) de l’Université de Bordeaux et d’ailleurs, ainsi que des membres de la société civile. Cette fois nous avons fait appel à une artiste et deux ingénieurs bordelais. Tous travaillent sur ces questions sur les plans sociologique, éthique, politique, économique et esthétique. Nous espérons que ces regards croisés nous donneront matière à nous questionner sur la place que ce mot d’utopie réelle (ou Eutopie) tient réellement dans nos vies quotidiennes où l’écologie politique à venir est assurément l’enjeu nodal.
Les intervenants universitaires :
- Thierry Dominici (MCF en science politique- membre du laboratoire IRM-Université de Bordeaux)
- Timothée Duverger (Ingénieur de recherche CNRS, membre du laboratoire Emile Durkheim, IEP Bordeaux)
- Sylvie Ferrari (Professeure des Universités, membre du laboratoire BSE-Université de Bordeaux)
- Flipo Fabrice (MCF en philosophie- membre du Centre Benjamin Franklin Université de Technologie de Compiègne)
- Louis Lasnon (Doctorant en science politique, membre du laboratoire CERREV, Université de Normandie)
- Alain Letourneau (Professeur des Universités en philosophie, membre du département de recherche FLSH -Université de Sherbrooke, Québec-Canada)
- Rumpala Yannick (MCF en science politique, membre du laboratoire Ernes, Université de Nice)
- Gauthier Simon (Doctorant en science politique- membre du laboratoire IRM -Université de Bordeaux)
- Bruno Villaba (Professeur des Universités, membre du laboratoire Printemps, Université AgroParisTech)
Les intervenants de la société civile :
- Véronique Grenier (artiste et sculptrice du vivant Le Musée Ephémère)
- Viviane Kopp (ingénieure territoriale de l’eau, animatrice du cite départemental de l’eau)
- Julien Dufour (chercheur indépendant, spécialisé sur les formes nouvelles de distribution alimentaire)
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